Le féminisme, nouveau combat des étudiants de Cambridge
Par Lucile Quillet
Publié le 20/06/2013 à 19:11
Exhiber fièrement ses aisselles pour lutter contre le sexisme.
Avec des slogans décalés, souvent drôles, parfois rugueux, 700 étudiants, filles comme garçons ont posé devant l’université pour la campagne «Cambridge Needs Feminism» en écrivant chacun pourquoi ils ont besoin du féminisme sur une pancarte.
«Cela ne devrait vraiment déranger personne», brandit la jeune étudiante rousse en exposant ses aisselles au naturel. C’est-à-dire poilues. Une autre réclame du féminisme car sa mère «continue de penser qu’il vaut mieux avoir un bon mari qu’un bon diplôme». Les uns après les autres, les jeunes répondent chacun à leur tour à cette simple question: «Pourquoi avez-vous besoin du féminisme?».
Il y en a 700. 700 jeunes de Cambridge, 700 raisons qui légitiment la lutte féministe. Ils ont répondu à l’appel de l’association CUSU Women (Cambridge University Student Union for Women) qui lutte contre les inégalités et préjugés sexistes. Le groupe avait décidé de se rallier au projet national «Who Needs Feminism» ,à l’origine du concept des messages sur les pancartes. Le but était «d’offrir la possibilité aux jeunes de Cambridge de dire au monde pourquoi ils luttent contre le sexisme et pensent que le féminisme est nécessaire», raconte Susy Langsdale de CUSU Women.
La majorité des participants sont des étudiants mais pas tous. Car «le sexisme est vécu par tout le monde, étudiant ou pas, justifie Susy. Nous voulions aussi faire participer la communauté locale». Pendant trois jours, l’association recueille les témoignages de passants. Leur page Facebook «Cambridge Needs Feminism» avec toutes photos fait le buzz. Plus de 4200 Likes, et près de 620 personnes ont partagés l’album photo géant. Le mouvement fait du bruit, si bien qu’il se retrouve sur le site du Huffington Post et de Cosmopolitan UK
Garçons et filles réclament le féminisme
Entre humour et réalisme, les messages font un peu l’effet d’un seau d’eau froide en pleine figure. Manque de professeurs femmes, clichés et amalgames et discrimination, tout y passe. Chaque message commence par «j’ai besoin du féminisme car…», suivi, entre autres, de:
«Car 1/3 des filles de 10 ans cite leur corps comme plus gros problème»
«Car moins d’1% des propriétés mondiales sont possédées par des femmes dans le monde»
«Car je veux être libre de décider du nombre de partenaires sexuels à avoir, sans être traitée de pute ou frigide»
«Car la société nous apprend “ne te fais pas violer” plutôt que “ne viole pas”»
«Car il n’y avait aucun portrait de femme dans notre lycée… à part celui de la Vierge Marie»
Habilement, la campagne donne aussi la parole aux garçons. Ces derniers affirment avoir besoin du féminisme, non pas par solidarité envers leurs camarades, mais pour des raisons qui les concernent eux directement. Extraits:
«Car je suis lassé qu’on me dise “man up”» (bombe le torse, ndlr)
«Car je n’ai pas eu de maître de conférence femme en trois ans»
«Car certains de mes amis se moqueraient de moi pour avoir participé à ça»
«Car je suis sexiste et je le sais», plaisante l’un d’entre eux.
Certaines écoles demandent de retirer les photos
Si l’association ne fait plus le pied de grue en distribuant ses pancartes dans la rue, Susy espère faire des émules. «Grâce aux échos dans les médias, beaucoup de gens nous ont demandé de participer. Nous espérons que cela s’étendra dans d’autres villes du monde, ce n’est pas un espoir irréaliste. Des campagnes similaires se sont montées depuis dans une école au Malawi et à l’université de York ».
Jinan Younis, étudiante anglaise avait lancé l’initiative auprès des élèves de l’école d’Altrincham. Elle raconte dans les colonnes du journal The Guardian comment, après le lancement de cette campagne, l’association a fait face à un tsunami de commentaires et messages haineux et insultants. Loin de les soutenir, l’école leur a demandé de retirer de la toile les photos des élèves posant avec les pancartes. Trop compromettantes pour la «sécurité des élèves».
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