Le Pape des pauvres passe à côté des femmes les plus démunies!
Dès son intronisation le Pape François avait donné le ton de son pontificat en affichant sa simplicité et son engagement auprès des plus pauvres. De quoi séduire les millions de catholiques à travers le monde et, parmi ceux-ci, les participants aux Journées mondiales de la Jeunesse (JMJ) qui se déroulent cette foi-ci au Brésil.
"Son message portera sur les problèmes que nous rencontrons tous, sur les défis qui se posent aujourd'hui à l’Église et à la société », a déclaré le cardinal Raymundo Damasceno, archevêque de Notre-Dame d'Aparecida, sanctuaire marial proche de São Paulo où le Pape célébrera une messe.
Mais de quels défis parle-t-on , de quelle société s'agit-il ?
Les plus pauvres des pauvres, les plus démunis des démunis, sont, sans le moindre doute, des jeunes jeunes filles, parfois même des fillettes, victimes de violences et de mariages précoces dans de nombreux pays du monde. Le principal défi de la communauté internationale aujourd'hui n'est-il pas de leur permettre d'accéder aux moyens de maîtriser leur fécondité ? Quel message crédible peut émettre une Église qui s’arque-boute sur une doctrine illogique et injuste, et qui n'est pas même capable de reconnaître aux femmes une place égale à celle des hommes dans la hiérarchie catholique ?
Pourtant, le moment d'annoncer un virage radical de l’Église sur le droit fondamental des femmes à disposer de leur corps aurait été bien choisi à l'approche des 20 ans de la conférence du Caire« population et développement » des Nations-Unies, conférence dont l'échec fût unanimement attribué à l'activisme effréné du Pape Jean-Paul II..
Personne n'aura oublié que ce Pape là, fort de son « charisme » et de son savoir faire diplomatique fit feu de tout bois pour s'opposer à toute ouverture en faveur du droit à l’avortement et à la contraception, activant non seulement les réseaux du Vatican, mais n'hésitant pas à faire alliance avec les États islamistes les plus rétrogrades (Iran, Arabie Saoudite,...) et allant même jusqu'à dénoncer un pseudo-complot international mené par les États-Unis pour juguler la croissance démographiques des pays les plus pauvres.
Les conséquences du sabotage de la conférence du Caire par le Vatican
Les chiffres – certes estimatifs - publiés par les instances internationales et par les plus compétents des réseaux d’expertise, sont accablants : sur les 200 millions de grossesses par an dans le monde, un tiers, soit 75 millions, ne sont pas désirées; près de 40 millions d'avortements sont pratiqués chaque année souvent dans des conditions dangereuses car, dans la majorité des pays, l’acte continue à être interdit par la loi, ce qui entraîne la mort de 80 000 mères et des centaines de milliers d'invalidités.
Dans le dossier de canonisation du Pape Jean-Paul II il serait juste d'ajouter, à côté des deux miracles qui sont attribuées au Pape polonais, les millions des victimes anonymes que la communauté internationale n'a pas su sauver en n'osant pas se dégager de l'emprise de l’Église, de toutes les Églises, sous prétexte de respect de la liberté religieuse.
Depuis lors, des voix autorisées ont commencé à se faire entendre : ainsi, le 4 octobre 2011 le rapporteur spécial de l'ONU sur le droit à la santé, Anand Grover, présentant en Assemblée Générale de l'ONU son rapport sur les incidences du droit pénal et des autres restrictions imposées dans le monde par les lois sur la santé en matière de sexualité et de reproduction a lancé un cri d’alarme : « Les lois qui pénalisent est restreignent l’avortement sont des exemples types d'obstacles inadmissibles à la réalisation du droit des femmes à la santé et doivent être abrogées. Ces lois constituent une violation de la dignité et de l'autonomie des femmes en restreignant fortement leur liberté de décision en matière de santé sexuelle et reproductive ».
L'Union Européenne se doit d'être à l'avant-garde!
L'Europe elle-même n'est pas exemplaire en la matière. Sur un sujet aussi fondamental, aucune harmonisation n'est imposée. Les droits reproductifs et sexuels sont fonction des politiques nationales et des pressions religieuses. Dans ce domaine « sensible » les droits acquis ne le sont jamais définitivement.
Exiger une totale dépénalisation de l'avortement au sein de l'UE devrait être l’un des thèmes prioritaires du LEF lors des prochaines élections.
Pour le bien des femmes de l'UE et pour que L’Europe pèse sur ce sujet dans le cadre des Nations-Unies
Mettre à distance les religions tel est le sens de la laïcité : condition première de l’émancipation des individus et surtout des femmes. Alors on pourra se dispenser d’écouter les paroles du bon Pape François et des autres religieux d’ici et d’ailleurs.
Annie Sugier, présidente de la Ligue du Droit International des Femmes, membre de la coordination française pour le lobby européen des femmes
Françoise Morvan, membre de la LDIF et Vice-Présidente de la coordination française pour le lobby européen des femmes
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