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Colloque « PLACE AUX FEMMES » - Palais Bourbon - samedi 18 juin

Appel : Pour un féminisme laïque et universaliste.
La situation des femmes révèle toujours le degré d’avancement démocratique d’une société. Il aura fallu des siècles de combats pour que le principe d’égalité entre hommes et femmes, en droits, en devoirs et en dignité, soit enfin reconnu. Il est encore loin d’être une réalité concrète au cœur même de la République française, comme en témoignent de sinistres tribulations dans le monde politique qui devrait pourtant être un exemple pour toute la société.

Fille des Lumières, l’égalité en droit entre tous, quelles que soient la naissance, la couleur, le sexe, les appartenances religieuses, philosophiques ou politiques, semblait progressivement s’installer comme un principe universel, au même titre que la liberté de conscience dont elle est inséparable.

Ces principes semblaient gravés dans le marbre d’une éthique ouverte à l’humanité toute entière, au-delà des appartenances culturelles, religieuses, philosophiques ou politiques. Ils sont aujourd’hui frontalement combattus par ceux qui leur opposent des revendications identitaires, différentialistes et communautaristes.

L’universalisme, clé de l’émancipation individuelle et collective, est désormais dénoncé par une mouvance anti républicaine comme une idéologie « colonialiste ». La laïcité qui, mettant à distance le politique du religieux, séparant la foi et la Loi, est le nécessaire levier de cette égalité, se voit accusée par les mêmes d’« islamophobie », dès lors qu’elle prétend s’appliquer à toutes les confessions. Le racisme, historiquement porté par l’extrême-droite, fait son retour sous le masque du racialisme, qui légitime la ségrégation des individus selon leurs origines. Le féminisme, enfin, est contesté dès lors qu’il affirme qu’aucun motif cultuel ou culturel ne peut justifier une restriction
des droits des femmes ni une entrave à leur exercice.

Ces dramatiques confusions, sciemment entretenues, fragilisent les fondements mêmes de la République tandis que s’imposent de par le monde les formes les plus régressives de contestation de l’égalité entre tous les êtres humains, du respect de leur intégrité physique et morale, de leur liberté à penser et à disposer d’eux-mêmes. Les femmes en sont toujours les premières victimes.

En Europe, ce sont les gouvernements les plus conservateurs, soutenus par des Églises rétrogrades, qui arc-boutent sur l’interdiction totale de l’avortement ou qui tentent de remettre en cause ce droit, là où il est déjà restreint à des conditions drastiques, comme en Espagne ou en Pologne. Ce sont également, au niveau de la Commission européenne, des lobbies intégristes qui sont à la manœuvre et tentent d’imposer leurs choix.
En Amérique centrale et du Sud, l’Eglise refuse l’accès à l’IVG des femmes enceintes porteuses du virus Zica dont il est pourtant avéré qu’il cause de graves malformations. Le pape, ami des pauvres et des opprimés, n’est pas celui des femmes ni de la laïcité, comme ses récentes déclarations en témoignent. Certains évêques, dont un représentant du Vatican, n’hésitent pas à affirmer publiquement que le viol est moins grave que l’IVG !
On ne compte plus les pays où les attaques au vitriol et les lapidations sont devenus monnaie courante ; où les crimes d’honneur se banalisent ; où des centaines de filles sont soustraites à l’école et au savoir, où elles sont enlevées pour être converties, mariées de force, humiliées, battues, transformées en esclaves sexuelles, assassinées.
En Allemagne et, simultanément, dans plusieurs autres pays d’Europe, lors du Nouvel an, des femmes sont attaquées et violentées dans la rue, par des groupes d’hommes organisés, qui considèrent sûrement que leur simple présence dans l’espace public est une invite à l’agression et « qu’elles l’ont bien cherché ».
En France, dans un nombre croissant de quartiers, la pression sociale d’une doxa machiste, alimentée par des prêches fondamentalistes, conjuguée au recul de l’État et des élus dans leur mission de défense de la République laïque et de ses valeurs égalitaires, aboutit à créer des enclaves qui s’alignent sur les théocraties et dictatures les plus rétrogrades pour justifier les violences faites aux femmes A commencer par le voile, de plus en plus couvrant, de plus en plus opaque, qu’il soit de marque ou grande distribution, étendard de la discrimination, que l’appétence à la servitude volontaire de certaines et la coupable lâcheté de leurs thuriféraires voudraient faire passer pour bannière de liberté.

Ce n’est pas par hasard si, à la façon des instituteurs de la III° République, les femmes sont devenues les nouveaux « hussards noirs » de la laïcité.

Grâce à nos idéaux universalistes et laïques, nous avons, nous, citoyens français, les armes qui nous permettent de lutter ensemble pour l’émancipation de la moitié de l’humanité, non pas au nom d’un quelconque particularisme qui vaudrait aux femmes de n’avoir des droits que parce qu’elles sont « autres » mais au nom de notre commune nature, et du fait que « tous les citoyens sont des femmes comme les autres ». La République universaliste, laïque et sociale, depuis qu’elle a compris, grâce à la lutte des femmes que celles-ci sont ses plus ardentes combattantes est désormais le meilleur rempart contre les régressions de tous ordres que tentent d’imposer les communautarismes, contre toutes les formes de racisme et contre l’extrême-droite qui se nourrit des renoncements et des peurs.

Alors que les crises sociales et les déchirures culturelles conjuguent leurs effets néfastes, nous appelons à un ressourcement explicite aux principes universalistes de la République, en premier lieu à l’égalité entre tous et toutes et à la laïcité qui, seule, permet de conjuguer liberté individuelle et cohésion citoyenne, singularité et égalité.

Marianne est l’autre nom de notre République. Il est temps de le rappeler à ceux – et celles, hélas – qui aimeraient tant qu’elle n’ait plus de nom.

Lien avec le journal Marianne
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COLLOQUE : PLACE AUX FEMMES
SAMEDI 18 juin

Intervention de Patrick Kessel
Président du Comité Laïcité République


Bienvenue à ce nouveau colloque du CLR organisé avec nos amies
de « Libres MarianneS » et de l’« Association pour le Droit
International des Femmes ».

Depuis des années, le CLR livre le combat culturel contre cette
confusion qui s’installe dans les têtes, à droite et à gauche, qui,
d’accommodements en renoncements, fragilise la République et
ses principes fondateurs.
Disons-le tout net, la République n’est pas une association de
communautés aux droits différents. Elle est l’ensemble des
citoyennes et des citoyens qui, quelles que soient leur naissance,
la couleur de leur peau, leur sexe, leurs appartenances
philosophiques, religieuses, politiques sont des femmes et des
hommes libres et égaux en droit.

Ces principes, issus de la philosophie des Lumières, portés par la
Révolution française, par le printemps européen de 1848, la
Commune, le Front Populaire, le Programme national de la
Résistance, ne sont pas négociables.

Depuis des années nous essayons de montrer que la montée des
revendications communautaristes fragilise la République. Car la
déchirure culturelle qu’elle engendre ne se réduit pas à la fracture
sociale.
Elle suscite une peur de l’autre qui, à son tour, nourrit une
extrême-droite qui a tenté un véritable hold-up sur la laïcité,
un détournement, stigmatisant l’ensemble des musulmans alors
que ces derniers sont les premières victimes de « l’islamo-
fascisme ».

Nous essayons de montrer que ceux qui, dans le déni, affirment
« qu’il n’y a pas de problème de laïcité en France » se trompent
lourdement. Ils croient lutter contre l’extrême-droite. A leur corps
défendant, ils en font le lit. Des pans entiers de l’électorat
populaire qui vivent au quotidien les méfaits des revendications
communautaristes, ont rejoint le Front National. Cette question
n’est plus théorique quand les sondages montrent que dans
presque tous les cas de figure, l’extrême-droite pourrait être
présente au second tour de la prochaine élection présidentielle.


C’est au lendemain des attentats barbares, après l’assassinat de
Charb, ancien président du jury du prix de la laïcité, que le CLR
décerne chaque année, de nos amis de Charlie hebdo, de policiers
dans l’exercice de leurs fonctions et de juifs qui avaient le tort
d’être juifs, que s’est révélé ouvertement l’ampleur d’un
mouvement communautariste qui s’attaque à tous les fondements
de l’universalisme républicain. Un universalisme qui a permis à la
Gauche d’écrire les plus belles pages de son histoire mais que
certains semblent avoir oubliées.

Après un sursaut émouvant du peuple de France, certains
intellectuels ont susurré « qu’ils l’avaient un peu cherché » ces
caricaturistes qui menaçaient le monde avec leurs petits feutres
de toutes les couleurs. Dans un second temps ils ont dit plus haut
qu’ils « n’étaient pas Charlie », voire qu’ils étaient « anti-Charlie ».
Au nom du relativisme, toutes les traditions devaient être
reconnues au même titre que les principes républicains. Parfois à
leur place. Un think tank de gauche n’avait-il pas déjà proposé de
négocier certains principes de la République afin de mettre en
place une citoyenneté à géométrie variable, adaptée aux
origines de chaque communauté ? Régis Debray l’avait
pronostiqué : le droit à la différence avait engendré la différence
des droits.

Et puis, certains différentialistes revendiqués ont enclenché la
vitesse supérieure, accusant d’ « islamophobie », de racisme, de
colonialisme
ceux pour qui la laïcité doit s’appliquer à tous,
chrétiens, juifs, bouddhistes, athées, agnostiques mais aussi aux
musulmans. Des musulmans qui, en France, dans leur grande
majorité, ne demandent qu’à vivre en citoyens avec les mêmes
droits et les mêmes devoirs que tous les autres citoyens.

Ainsi la laïcité qui garantit la liberté de conscience et l’égalité en
droit entre tous, et en premier lieu entre femmes et hommes, a-t-
elle été accusée d’être « liberticide » alors que ce sont les
autorités cléricales qui, le plus souvent, se sont opposées à l’école
laïque, au divorce, à la contraception, à l’IVG, à la PMA, à l’égalité
hommes-femmes, à l’émancipation des femmes, à la liberté de
conscience, à la recherche scientifique, à l’abrogation du délit de
blasphème et encore tout récemment au mariage pour tous !

Nouvelle mais ô combien désopilante version de l’arroseur-
arrosé ! L’antiracisme qui demeure un combat essentiel, se trouve
détourné tandis que le racisme, historiquement porté par
l’extrême-droite, fait son retour sous le masque du racialisme
lequel légitime la ségrégation des individus selon leurs origines.

C’est l’universalisme des Lumières qui est désormais dénoncé en
tant que tel. La situation est grave car cette idéologie
différentialiste a gagné des positions fortes en particulier dans le
monde politique et médiatique, à droite mais aussi à gauche qu’on
pouvait imaginer prémunie contre une telle dérive.

C’est avec le souci de réveiller les consciences sur la montée des
périls que le CLR a organisé toute une série de colloques sur la
situation dans les écoles, les crèches, dans certaines universités,
dans des hôpitaux, dans des entreprises, dans les prisons,
interpellé les pouvoirs publics afin que des solutions soient
trouvées et que le terrain ne soit pas abandonné aux populismes.

Mais le ver est désormais dans le fruit.
La situation des femmes révèle toujours le degré
d’avancement démocratique d’une société
. Il aura fallu des
siècles de combat pour que le principe d’égalité entre hommes et
femmes en droits et en devoirs, en dignité, soit enfin reconnu.
La laïcité, mettant à distance le politique du religieux, séparant la
Foi et la Loi, est le nécessaire levier de cette égalité. Ce n’est pas
par hasard si, à la façon des instituteurs de la III° République, les
femmes, en France mais aussi bien loin de nos frontières, sont
devenues les « nouveaux hussards noirs » de la laïcité.

Cette égalité est encore loin d’être une réalité concrète au cœur
même de notre République. C’est le moment choisi par certains
pour attaquer le féminisme, dès lors qu’il affirme qu’aucun motif
cultuel ou culturel ne peut justifier une restriction du droit des
femmes. La liberté des femmes à disposer d’elles-mêmes ne serait
qu’une lubie occidentale, une arme postcoloniale contre les
peuples opprimés ! Les mêmes qui revendiquent le port du
voile, partout, n’ont pas un mot pour ces millions de femmes
qui, quotidiennement, risquent leur vie pour avoir le droit de
ne pas le porter !


Une telle dérive n’est plus acceptable ! A quelques coudées de
l’élection présidentielle, le sursaut constitue une mesure de
salubrité publique. Car la confusion, la perte des repères, le
relativisme sont toujours propices à la montée des
conservatismes et des extrémismes.

C’est la raison pour laquelle nous avons organisé ce colloque et
que les trois associations, Libres MarianneS, l’association pour le
Droit International des Femmes et le Comité Laïcité République
ont décidé de lancer un nouvel appel du 18 juin, un appel à la
résistance et au sursaut
, que Marianne publie ce jour sur son
site et vendredi prochain dans sa version magazine. Cet appel
dont j’ai cité certains passages vous sera remis à l’issue de cette
réunion.

Merci à Marianne, aux trois modérateurs, Joseph Macé-Scaron,
président du comité éditorial de Marianne, Martine Gozlan,
rédactrice en chef et Alexis-Lacroix, directeur-adjoint, dont les
plumes courageuses défendent chaque semaine notre éthique
commune de la citoyenneté.

Le danger est là. Certains, heureusement en ont pris la mesure. Le
Premier Ministre, Manuel Valls, à deux reprises, a participé à la
cérémonie de remise du Prix annuel de la Laïcité que décerne le
CLR. Il a dit clairement son engagement en faveur de la laïcité.
Cet après-midi, nous accueillerons Gilles Clavreul, le délégué
interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme dont
on sait l’engagement en faveur des principes républicains.

Ce matin, nous avons l’honneur et le plaisir de recevoir Mme
Laurence Rossignol
, Ministre des Familles, de l’Enfance et des
Droits des Femmes.
Madame Rossignol, vous êtes ministre mais vous êtes aussi et
d’abord une femme courageuse. Vous avez essuyé les foudres des
différencialistes. Nous vous avons alors témoigné notre soutien et
notre sympathie. Je souhaite réitérer ce message et vous dire
combien nous sommes à vos cotés .

Madame la ministre, merci d’avoir répondu à notre invitation.
Vous avez la parole.

LDIF, La Ligue du Droit International des Femmes
6 place Saint Germain des Près 75005 PARIS France